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Pays-Bas-RFA, quand la guerre rattrape le football

Pays-Bas-RFA, quand la guerre rattrape le football
Marco Van Basten a offert la victoire aux Pays-Bas dans les tout derniers instants du match face à la RFA en demi-finale de l'euro 1988 (2-1)

En 1988, à l’occasion des demi-finales de l’Euro allemand, les Pays-Bas et la RFA s’affrontent dans une rencontre qui dépasse le cadre du football. Et pour cause : les Néerlandais voient dans ce match l’opportunité d’expurger la haine qu’ils vouent aux Allemands depuis la Seconde Guerre mondiale.

Le 21 juin 1988 est une date particulière pour les Pays-Bas. Ce jour-là, les Oranje s’apprêtent à disputer une demi-finale de championnat d’Europe, à Hambourg, face à un adversaire qui leur est familier : le pays hôte de la compétition, la RFA. Les Néerlandais rêvent alors de se venger des Allemands de l’Ouest, qui les ont battus lors du premier tour du championnat d’Europe 1980 (3-2) et tenus en échec deux ans plus tôt lors du Mundial argentin (2-2). Surtout, les Pays-Bas ne digèrent toujours pas leur défaite en finale du Mondial 1974, face à ces mêmes Allemands (2-1). Mais au-delà de la volonté de laver l’affront purement sportif, les Oranje tiennent surtout à venger la mémoire de leur pays. En 1940, l’Allemagne nazie envahit le pays des tulipes, qu’elle occupera ensuite pendant cinq ans, causant au passage la mort de milliers de personnes et l’extermination de près de 80% de la population juive néerlandaise. Un traumatisme pour tout un pays, qui entraînera une haine profonde envers les voisins allemands. Cette animosité se retrouve d’ailleurs sur le terrain, lorsque les deux équipes s’affrontent. En 1980, lors de l’Euro italien, Harald Schumacher et Huub Stevens en viennent aux mains, tandis que René van de Kerkhof expédie son point dans l’œil de Bernd Schuster. Wim van Hanegem, finaliste du Mondial 1974 avec les Pays-Bas, déclarait ainsi : « Je ne voulais pas seulement gagner, je souhaitais les humilier. Ils (les Allemands) ont tué mon père, ma sœur, et deux de mes frères. Chaque fois que je les affronte, je suis rempli de haine. »

« Cette victoire est un cadeau à nos ancêtres »

Ce 21 juin 1988, plusieurs banderoles hostiles aux Allemands sont déployées dans les tribunes du Volksparkstadion. Parmi celles-ci, on peut y lire le message suivant : « le temps de la revanche a sonné ». Cependant, c’est bel et bien la RFA qui ouvre le score, grâce à un pénalty transformé par Lothar Matthaüs à la 55e minute. Pas de quoi faire trembler les Oranje, qui recollent au score à la 74e minute par l’intermédiaire de Ronald Koeman, également sur pénalty. Puis, dans les tout derniers instants du match, Marco Van Basten offre la victoire à son pays en taclant du droit une ouverture de Jan Wouters. Le pays est en liesse, les joueurs affichent leur soulagement. « J’ai attendu ça depuis tellement longtemps. Cette victoire est un cadeau à nos ancêtres » déclare le gardien Hans van Breukelen. « Justice est faite. Je peux voir d’ici les larmes et l’émotion des anciens » affirme pour sa part le capitaine Ruud Gullit. Quatre jours plus tard, à l’Olympiastadion de Munich, les Néerlandais viennent à bout de l’URSS en finale (2-0, buts de Gullit et Van Basten) et remportent ce qui est encore à ce jour le seul trophée international de leur histoire. Une joie d’autant plus grande qu’elle a été acquise sur les terres de l’ennemi juré. Le peuple orange ne pouvait rêver mieux. L’affront est lavé, et de quelle manière !

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