26 septembre 2008. Les membres du comité exécutif de l’UEFA - Franz Beckenbauer en tête - quittent Bordeaux en se frottant les mains. Ils viennent d’entériner le passage historique du format de l’Euro 2016 à 24 équipes alors qu’il se jouait à 16 nations depuis 1996. Avec le succès qu’on lui connaît. Si on ne peut évidemment pas encore tirer à boulets rouges sur l’Euro français à proprement dit, on peut cependant disséquer ses éliminatoires dont la phase principale a pris fin hier soir avec les qualifications turques et croates.
Oranges mélancoliques
Quand la nouvelle d’un Euro à 24 est tombée, les premières réactions du peuple ont tourné autour des formats de qualification. Déjà que les précédentes éditions n’offraient guère de suspense concernant le sort des nations phares du Vieux Continent, les éliminatoires de la cuvée avec trois places dîtes « gagnantes » n’allaient rien offrir de réjouissant. Même Platoche ne s’en cachait pas en 2008 : « Ce n’est pas moi qui ai pris la décision, ce sont les 53 associations nationales, qui ne sont pas bêtes et qui ont compris que ce serait plus facile de se qualifier ! » Mais qu’en disent les Néerlandais aujourd’hui ? Boutés hors de la phase finale, les Orange ont accompli une sorte de miracle en ne survivant pas à une phase éliminatoire pour la première fois depuis trente ans. La Grèce, championne en 2004 et récente huitième de finaliste du Mondial brésilien, a désormais le nez dans le gazon. Les champions du monde allemands, eux, ont dû attendre la dernière journée pour se qualifier. Contrairement à ce qu'on attendait, l'indécision a réellement jalonné les qualifs jusqu’aux dernières encablures d’Italie-Norvège (2-1) et de Turquie-Islande (1-0) hier soir qui, à un quart d’heure près, auraient envoyé les Scandinaves et la Hongrie directement à l’Euro alors que ce sont finalement les Turcs et la Croatie qui ont validé leur ticket. Non, vraiment, on a parlé trop vite car du suspense et des surprises, il y en a eu du début à la fin. Bravo Michel !
Le sacre des British
Par ailleurs, le saviez-vous ? La volonté d’élargir l’Euro s’est matérialisée en 2007 lorsque l’Angleterre s’est cassée les dents sur la route de l’Euro helvético-autrichien. L’absence des Three Lions avait ainsi consacré une vérité incommodante du côté de l’UEFA: l’absence totale de nation britannique pour un championnat d’Europe des nations. « En 2007, juste avant que je devienne président de l’UEFA, déclarait Platini il y a trois ans, deux personnes sont montées à la tribune pour demander que l’on passe de 16 à 24 équipes, un Irlandais et un Écossais. C’est vrai qu’il n’y avait aucune équipe britannique en 2008. » On ne s’étendra pas sur les nécessités purement économiques de voir le très-féru-de-foot Royaume-Uni avancer ses pions dans un Euro. On pourra simplement constater que s’il y a un groupement de nations auxquelles la réforme a grandement profité, c’est assurément les Britanniques. L’Angleterre a été la meilleure formation des éliminatoires alors que le Pays de Galles et l’Irlande du Nord lui ont officiellement emboité le pas vers la phase finale. Ironie du sort pour les deux messieurs qui réclamaient la réforme : leurs pays, l’Irlande et l’Ecosse, ne sont pas à l’Euro. Il reste toutefois une chance au Boys in Green de rallier la France en 2016 : les barrages.
5 petits poucets
Enfin, et on le sait, Michel Platini est un fervent défenseur des petits poucets. Il l’a prouvé à maintes reprises avec la Ligue des champions et la Ligue Europa dont les réformes principales ont visé à élargir le cercle et à accueillir des clubs méconnus de nations mineures. Et lorsqu’il a annoncé le nouveau format de l’Euro, le président de l’UEFA souhaitait donner leur chance à des petits pays. Et le bonhomme ne s’inquiétait absolument pas d’un éventuel nivellement de la compétition vers le bas. « Je pense qu’on a 24 bonnes équipes en Europe, si vous songez à celles qui manquent cette année (2012, ndlr) : la Norvège, la Belgique, etc. Par contre à 32, c’est plus difficile, le niveau baisserait forcément. » Avec les Gallois, la Slovaquie, l’Irlande du Nord, l’Islande et l’Albanie dont ce sera le premier Euro, notre Michel national peut pousser un cri victorieux. Il offre à sa compétition un supplément d’exotisme. Soit. Et il ouvre forcément les marchés de l’Euro 2016 à d’autres contrées, ce qui ne peut que profiter aux finances de l’UEFA. Sur un plan purement organisationnel, la création de semaines entières dédiées aux éliminatoires a également été un réel succès, apportant plus de lisibilité que jamais à des qualifications qu’on avait toujours eu du mal à suivre en raison des énormes concentrations de matchs journalières. Autant de raisons qui font que pour l’Euro 2020, l’UEFA ne va pas se creuser la tête et gardera probablement les mêmes formats éliminatoires. A cela près que les barrages seront certainement remplacés par la future Ligue des nations de l’UEFA. Parce que Michel ne peut malgré tout pas s’empêcher d’innover année après année.