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Classement et finances : l’Europe des pauvres

Classement et finances : l’Europe des pauvres
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On s’entête à dire que la puissance financière d’un club détermine presqu'assurément à l’avance le classement final qu’il occupera dans sa ligue. Alors qu’un quart des principaux championnats européens a déjà été disputé, nous avons passé en revue les classements sous fond d’analyse financière. Deuxième volet avec la mise en exergue de championnats moins à l’aise financièrement avec les cas allemands, italiens et bien évidemment français.

Bundesliga : le richissime Bayern a logiquement pris les devants

Les saisons passent et se ressemblent en Bundesliga. L’ultra-dominateur Bayern Munich enfonce même le clou cette saison puisqu’il a entamé le championnat par dix victoires en autant de rencontres. Terrific ! Si l’on peut y voir le fruit du travail de Pep Guardiola, sur le banc bavarois depuis trois saisons, il n’empêche que le leader incontesté en Allemagne est aussi le plus riche du championnat. Pour preuve, le Bayern a amassé 50 millions d’euros grâce à sa campagne de Ligue des champions l’an passé, 17 de plus que son rival le plus sérieux, le Borussia Dortmund, qui s’accroche tant bien que mal sept points derrière. Tout puissant, le club munichois règne aussi en maître sur les revenus liés à la billetterie. En attendant que les excellents chiffres de 2015 ne tombent, basons-nous sur l’année fiscale 2014 pour voir qu’elle avait rapporté 109 millions d’euros au club bavarois. Loin devant les 45 et 41 millions grapillés par Hambourg et Dortmund. Il y a du jeu à Munich mais il y a donc aussi de l’oseille : Douglas Costa et Arturo Vidal ne sont pas tombés du ciel.

Si après dix journées on ne peut légitimement pas faire de plan sur la comète, on constatera cependant que les plus petits budgets de la saison allemande, Ingolstadt et Darmstadt, promis à la relégation en début de saison, occupent la 8ème et la 11ème place. Ce qui pourrait n’être toutefois que l’effet euphorisant d’une récente promotion, demandez-donc à Paderborn qui avait démarré fort l’an passé jusqu’à se faire aspirer en D2 par une réalité sportive mais aussi économique. Le seul paradoxe allemand reste les cas de clubs historiques tels que Hambourg ou Stuttgart (actuels 10ème et 16ème), capables de dégager des recettes colossales mais à la rue depuis plusieurs saisons. En somme, la conséquence directe de la bonne santé financière globale des clubs allemands qui redistribue les cartes partout sauf au sommet.

Serie A : les petits dans le dur mais les Milan aussi

La compassion pour les petits poucets, en Italie, on ne connaît pas. Novices en Serie A, Frosinone et surtout Carpi, bon dernier, sont dans le durs. Après dix journées disputées, les deux budgets les plus étriqués de l’élite italienne sont englués dans la lutte pour la relégation et devront batailler pour se sauver aux côtés d’autres petits poissons (Hellas Verone, Bologne, Empoli…). La logique économique est ici respectée mais si les grosses forces de frappes financières (AS Roma, Naples, Fiorentina) ont pris les commandes, on cherche toujours le roi d’Italie qui végète au beau milieu du classement. 90 millions de revenus engrangés en Ligue des champions avaient pourtant fait de la Juventus le club d’Europe le mieux rémunéré par la C1 la saison dernière. Merci le statut de finaliste et la défaillance des autres clubs transalpins dans cette campagne. Quadruple championne d’Italie, la Vieille Dame a les poches qui débordent d’argent, ce qui pour autant, ne l’empêche pas d’être accrochée à une anonyme douzième place. Alors comment expliquer cette inadéquation entre performance sportive et puissance financière ? Tout simplement une transition mal digérée que des liasses de billets ne sauraient colmater. En se débarassant des "vieux" Vidal et Pirlo, en confiant les clefs à un Pogba en grosse méforme et en pariant sur Mandzukic et Dybala, le club turinois a pris des risques et les paie cash. Reste que sur l’étendue d’une saison, la Juve devrait tendre vers l’équilibre des places d’honneur mais a sûrement tiré un trait sur le titre.

Restent enfin les cas plus épineux et obscurs des clubs milanais. Le milliardaire Erick Thohir devait redorer le blason de l’Inter et le richissime Bee Taechaubaul épauler Silvio Berlusconi pour relancer l’AC Milan. Les deux clubs lombards avaient d’ailleurs été les plus dépensiers sur le marché des transferts estival en Italie, ce qui leur promettait un retour express au sommet. Sur le papier, la réalité est toutefois plus fracassante. Si l’Inter (5ème) est dans le coup à 2 points du leader romain, elle marque le pas après un départ canon. Huitième, l’AC Milan de Carlos Bacca ne propose rien de grandiloquent et n’a pas le profil d’un européen en puissance. S’il y a l’argent à Milan, il n’y a toutefois ni structure solide autour de ces apports budgétaires ni gouvernance financière légitime pour bâtir un projet pérenne. Désireux de faire sortir un nouveau stade de terre pour booster leurs recettes, les deux ennemis milanais l’ont d’ailleurs bien compris. Mais le projet bat à l'heure actuelle complètement de l’aile.

Ligue 1 : la vraie ligue des pauvres

S'il est un championnat de second rang, hélas, c'est bien le nôtre. Bientôt septième au ranking UEFA, la Ligue 1 est à la rue tant financièrement que sportivement. Dominée de la tête et des épaules par un PSG qui la toise du haut de ses 500 millions de budget, notre compétition nationale inaugure une absence de suspense qui la rend moins attractive. Pour le spectateur français, pour l'étranger et pour les équipes qui défient l'ogre qatari, le championnat est d'ores et déjà plié. Reste à distribuer dès le mois de novembre les accessits et autres mentions honorifiques... Navrant.

Structurellement déficitaire, incapable de rivaliser à l'échelle européenne, la Ligue 1 inaugure une nouvelle forme de médiocrité : elle cumule la domination munichoise de la Bundesliga par l'entremise du PSG avec son corollaire, l'absence de concurrence, à l'incurie italo-anglaise des équipes comme Newcastle ou l'Inter qui pâtissent d'une absence de gouvernance économique raisonnable. On aime beaucoup Caen et Angers mais leurs performances et leurs classements ne devraient pas être ce qu'ils sont au regard de leurs budgets et de leurs effectifs. Car il faut être deux pour chuter ou gagner...

Marseille s'est effondré, Lyon n'est que le spectre de l'équipe de l'an passé alors qu'elle s'est considérablement renforcée. Quant à Monaco ou Saint-Étienne, l'objectif a davantage été "vends le plus que tu peux et ne recrute qu'à moindre frais". Sans parler de Rennes qui n'a jamais vraiment existé sportivement ces dernières années. Un bien beau tableau offert pour notre visibilité à l'étranger et la satisfaction des supporteurs français...et une vraie consternation pour seule consolation.

En clair, la Ligue 1 souffre de ses tares structurelles et de ses retards face à ce qu'est devenu le football moderne. Sa pauvreté (billetterie, recettes merchandising, droits télévisés...) est son premier frein et l'initiative Première Ligue n'y changera (presque) rien. L'indigence de stades et de ses structures (Bastia, Ajaccio, Montpellier...) ne sera pas modifiée par les financements publics de l'Euro 2016 et ses retombées. Et pour ce qui est de ses présidents, à quelques trop rares exceptions, ils ne sont ni des professionnels ni au fait de ce qu'est devenu le sport-spectacle mondialisé.

Tout juste bonne à servir de servir de sparring-partner à une équipe de Paris qui la fait exister hors des frontières et qui cache sa misère, la Ligue 1 doit être révolutionnée et véritablement réformée. Elle ne peut se contenter fourbir les équipes B de Premiere League ou les effectifs pléthoriques des grands clubs mondialisés. Et plus délicat, elle ne pourra survivre si elle compte sur sa seule politique de transferts déséquilibré pour maintenir notre intérêt de spectateur et d'amateur du jeu. À bon entendeur, merci de la regarder par charité pour qu'elle puisse encore exister...

Retrouvez le premier volet de cette étude en cliquant ICI.

Par Jean-Baptiste GUEGAN et Aurélien RENAULT

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