« Trois jours se sont succédés depuis les sombres attaques, trois jours de questionnement, trois jours d’apathie, soixante-douze heures de choc dont nous déchirons enfin le voile. Vendredi soir, aux alentours de 21h, de multiples attaques terroristes pleines de haine ont vrombi dans Paris ainsi que sur le parvis du Stade de France. Quel qu’ait été l’objectif ancré dans la tête de nos assaillants, ceux-ci avaient choisi des lieux précis parmi lesquels figurait l’enceinte dionysienne. Un lieu de vie ô combien symbolique dans l’imaginaire collectif français : celui d’une France triomphante, portée aux nues par un peuple plus uni que jamais dans sa diversité, celui d’un 12 juillet 1998 qui résonnera toujours plus fort que ce sombre 13 novembre 2015. Ils avaient d’ailleurs choisi d’attaquer un jour de France-Allemagne, affiche plus que jamais marquée par une fraternité totale entre deux nations, bâtie sur les cendres de violences d’une autre époque et pleinement révolues. Des attaques grotesques contre une affiche pleine de paix.
Le déroulement des faits autour du Stade de France reste flou à l'heure qu'il est mais s’il est une satisfaction à aller creuser autour des événements de vendredi soir, c’est bien que les supporters de Saint-Denis aient été épargnés. Épargnés mais toutefois menacés. Les artères de Paris, ses lieux de vie, ses cafés, ses restaurants, son Bataclan n’ont hélas pas échappé au feu de l’ennemi. Pour notre plus grand malheur. Le son vivifiant de la musique, la saveur si douce d’un vin en terrasse, le fumet vaporeux d’un beurre maître d’hôtel qui fond sur une entrecôte rue de Charonne, les clameurs du football et la passion qu’il suscite ont été pris pour cible par des monstres. Tout ceci nous est intolérable. Dans la nuit automnale, alors que des cris de joie étreignaient le Stade de France et venaient consacrer les buts d’Olivier Giroud et d’André-Pierre Gignac, la désolation avait déjà marché sur la ville. Un contraste parlant qui rappelle que si la mort, si dramatique, provoque un déluge de larmes, une chose aussi futile qu’un ballon qui entre dans une cage peut déclencher un torrent d’allégresse. Le chemin vers le plaisir sera donc toujours le plus court mais aussi le plus riche.
La France est un pays de droits et de libertés, hérités d’une Histoire riche et précieuse que nul individu quel qu’il soit ne saura remettre en cause ou faire s’écrouler. Parmi ces libertés, notre pays nous offre la possibilité de déchirer nos cordes vocales au milieu d’une tribune, de nous parer de toutes les couleurs de la tête au pied, de célébrer nos héros sur un parvis de stade... Nous étions 80 000 au Stade de France vendredi et c’est une certitude, nous y retournerons à 80 000. Terroristes, n’avez-vous pas compris le message envoyé par ces Français qui chantaient leur hymne national à tue-tête, bravant la peur, la menace et leur incertitude ? Avez-vous vu à quel point la futilité de nos guéguerres de footeux a laissé place à d’inédites scènes de fraternité entre supporters ? Oui, Daesh, le football ne s’est pas divisé selon tes souhaits. On a vu des supporters de Tottenham et d’Arsenal s’unir avec fierté, on a vu des Italiens embrasser le drapeau tricolore avec une passion déchirante, on a contemplé une banderole de soutien à Paris déployée par des Ultras marseillais. Devant ta violence et face à la mort que tu as déchaînée, le football a prouvé qu’il savait s’unir et faire tomber ses clivages. Devant tes charges obscènes, le sport a brandi toutes ses valeurs d’union et de compassion. Tout le football et tout le sport en général en sont sortis vainqueurs. Toi, tu as lamentablement échoué.
Nous sommes Paris. Derrière cette accroche de soutien en vogue, nous sommes aussi Rue du Football, une équipe de jeunes journalistes qui aspirent depuis plusieurs semaines à partager leur passion pour le ballon rond. Si les terroristes ont cherché à nous effrayer et à nous retourner les uns contre les autres, sachez que notre famille en sortira plus soudée encore. Notre peur, légitime, sera très vite annihilée par notre force collective. Croyez-nous, on peut vaincre l’effroi semé par le terrorisme avec un bon 4-4-2. Face à la haine, déployons donc nos passions. Nous le promettons, ce football qu’entre autres passions ils appellent perversion, notre site va vous le faire vivre plus que jamais. Chers fans de football, inondez toujours plus les stades, braillez plus encore votre passion derrière vos joueurs, continuez à envahir les bars et utilisez ce merveilleux prétexte qu’a toujours été le football pour vous réunir entre amis et vivre de précieux moments de partage. Contrairement aux leurs qui sèment la violence, nos balles - en cuir - n’ôteront jamais la vie. Ne laissons pas tempêter ces moments d’horreur. Compagnons de la musique, du cinéma, du sport et de toutes ces passions et ivresses que nous offre notre France chérie, en réponse à la mort, mordons dans la vie. Le football est, et restera, liberté. »
Rue du Football